.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


mercredi 16 février 2022

Carolina Cárdenas (1984 - Colombie)

 


Poissons d’eaux mortes

Aux indigents

 

Les oubliés à peine respirent entre les égouts

et le soleil flétrit et gonfle leur visage

au point de les défigurer.

Alors un jour ils oublient leur nom

et leur plus précieux souvenir.

Ce sont des morts qui méconnaissent leurs pas.

Des corps battus qui naufragés

tentent de s’en sortir.

Personne ne les entends, ils sont un cri qui disparaît

entre les fissures, la nuit et les fleuves.

Ce sont des poissons d’eaux mortes

qui se cachent dans leur chute.


 

Peces de aguas muertas

 A los indigentes

 

Los olvidados apenas respiran entre cloacas

y el sol hincha y marchita sus rostros

hasta no reconocerse.

Entonces un día olvidan sus nombres

y su más preciado recuerdo.

Son muertos que desconocen sus pasos.

Cuerpos pegados que náufragos

intentan salvarse.

Nadie los oye, son un grito que desaparece

entre las grietas, la noche y los ríos.

Son peces de aguas muertas

que se esconden en su caída.

 

 

Bogotá, le 6 août 2020

À moi qui ai des idées répétitives

  

Ma pensée est une nébuleuse de mouches

                                                           où converge la

même idée à l’état larvaire

Je plonge dans le paysage d’un édifice qui se répète

entre des avenues de nuages qui exhalent une odeur de cadavre

et me laissent croire que je vis dans un cloaque

où poussent des roses et des tulipes comme des fleurs grimpantes

Où le silence n’existe pas à moins d’être du bruit

 

Je suis un tumulte dans un lieu où seul le cri est possible

pour briser avec le regard fixe la même réflexion

et la parole qui revient comme une vague

      au rivage du temps


 

Bogotá, 06 de agosto de 2020

 A mí que tengo ideas repetitivas

 

Mi pensamiento es una nebulosa de moscas

donde converge la

misma idea en estado larval

Me sumerjo en el paisaje de un edificio que se repite

entre avenidas de nubes que exhalan olor a cadáver

y me hacen creer que vivo al interior de una cloaca

donde brotan rosas y tulipanes como enredaderas

En la que el silencio no existe a menos que sea ruido

 

Soy estruendo en una estancia donde el grito es lo único posible

para romper con la mirada fija    la misma cavilación

y la palabra que como una ola vuelve

    a la orilla del tiempo