.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


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mercredi 15 juillet 2020

Corina Oproae (1973 - Roumanie / Espagne)






tu sais tout de moi

mon frisson de pierre rougissante
au lointain
mon bruit de rivière silencieuse
qui entraîne impassible
cendre et larmes

tu sais que ma blessure
est le ventre du monde
l’utérus qui se contracte
pour expulser la douleur
enveloppée dans un placenta fragile
qui fond comme la neige

la même blessure
laisse entrer en toi
la lumière perpétuelle

tu sais que mes rêves peuvent être
une file de fourmis
s’ouvrant un chemin
vers l’éternité
ou de minuscules oiseaux
étouffés
dans leur propre sifflement
prolongé jusqu’à la stridence

c’est dans la même blessure
que le monde s’ouvre à nous
s’offre pour savoir
si nous avons vécu

un printemps indompté
fait un nid dans ta gorge

ton savoir sur moi
monte           comme la douleur
à mesure qu’il prend sens

la seule chose qui importe
maintenant est d’honorer
le même silence


todo lo sabes de mí

mi temblor de piedra ruborosa
en la lejanía
mi ruido de río silencioso
que arrastra imperturbable
ceniza y llanto

sabes que mi herida
es el vientre del mundo
útero que se contrae
para expulsar el dolor
envuelto en una placenta frágil
que se funde como las nieves

la misma herida
deja entrar en ti
la luz perpetua

sabes que mis sueños pueden ser
filas de hormigas
abriéndose camino
hacia la eternidad
o pájaros minúsculos
ahogados
en su propio silbido
alargado hasta la estridencia

es en la misma herida
que el mundo se nos abre
se nos ofrece
para saber si hemos vivido

una primavera indómita
hace nido en tu garganta

tu saber de mí
sube                como el dolor
cuando cobra sentido

lo único que ahora importa
es honrar
el mismo silencio
 

samedi 11 mai 2019

Corina Oproae (1973 - Roumanie)



sur le ventre

     en lisant Chantal Maillard
  

La peur
me devient ventre
et paralyse ma danse.
Le futur
me regarde avec des yeux vides
de statue.
Je me traîne
dans la voix obscure
du cri
et au lieu de mots
j’articule des oiseaux
noircis
comme les âmes
de tant de morts
sans nom
et dénué de sens.
Mon corps
est un arbre
avec des feuilles de plomb
vaincu par le vent
de la douleur lointaine.
Le soleil ne niche plus
dans mes branches.
Je suis la fille illégitime
de la vengeance.

Malgré tout
je rêve parfois
des rêves qui fleurissent.
Mais je l’ignore
et je dors sur le ventre.


boca abajo

   leyendo a Chantal Maillard


El miedo
se me hace vientre
y paraliza mi danza.
El futuro
me mira con ojos vacíos
de estatua.
Me arrastro
dentro de la voz oscura
del grito
y en vez de palabras
articulo pájaros
ennegrecidos
como las almas
de tantos muertos
sin nombre
y sin sentido.
Mi cuerpo
es un árbol
con hojas de plomo
vencido por el viento
del dolor lejano.
El sol ya no anida
en mis ramas.
Soy la hija ilegítima
de la vergüenza.

A pesar de todo
hay veces que sueño
sueños que florecen.
Pero yo no lo sé
y duermo boca abajo.