.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


jeudi 18 février 2021

Ela Urriola (1971- Panama)

 

BLANC SUR BLANC

 

« Là où grandit la danger grandit aussi ce qui sauve »

Friedrich Hölderlin

 

 

Blanc

comme l’insomnie,

comme les rideaux

qui endorment l’enfance,

comme ce mot

qu’égrènent les lèvres

quand elles réclament un lendemain ;

blanc

comme nous à l’intérieur

quand on s’éteint.

 

Blanc le souvenir

que la hâte a effacé ;

blanc de titane

qui submerge la spatule,

la lune s’égrène

et le faune chante

depuis le ressac.

 

Blanc

comme des traces

à disperser,

comme la solitude

sur le bout de la langue,

parce qu’il est impossible

de soutenir le rien.

 

Tulles et ombre lunaire

qui engloutissent

de leur danse ;

blanc

le vide,

poussière de chrysalides,

arrière-goût de peau

blottie dans le toucher,

blanche cette nostalgie de tout ;

le geste qui traîne

dans le dos.

 

La neige

murmure

leurs noms,

leurs bouches croassent et nous rêvons

d’attraper

le corbeau ;

obscurité

en rafales :

l’aube

et le nuage qui se plient ;

ils furent une fois le blanc

de figures

sobres

et soignées.

 

BLANCO SOBRE BLANCO 


« Dónde  sin embargo el peligro se halla,

crece la salvación también »

Friedrich Hölderlin

 

Blanco

como el insomnio,

como las cortinas

que adormecen la infancia,

como esa palabra

que desgranan los labios

cuando piden el mañana;

blanco

como nosotros por dentro

cuando nos apagamos.

 

Blanco

el recuerdo

que la prisa fue borrando;

el titano

embiste la espátula,

la luna se desgrana

y el fauno canta

desde la resaca.

 

Blanco

como huellas por

dispersar,

como la soledad

en la punta de la lengua,

porque es imposible

sostener la nada.

 

Tules y umbra lunar

que engullen

con su danza;

blanco

el vacío,

polvo de crisálidas,

resabio de piel

acurrucada en el tacto,

blanca esta nostalgia de todo;

el gesto rezagado

en la espalda.

 

La nieve

susurra

sus nombres,

graznan sus bocas y soñamos

que atrapamos

al cuervo;

oscuridad

en ráfagas:

la madrugada

y la nube que se pliegan;

fueron el blanco alguna vez

de

figuras

escuetas

y esmeradas.