.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


lundi 8 octobre 2012

José Emilio Pacheco (1939 - Mexique)







Écrit à l’encre rouge

La poésie est l’ombre de la mémoire
mais elle sera matière de l’oubli.
Non pas la stèle dressée dans la forêt profonde
pour perdurer au milieu de ses corruptions,
mais l’herbe qui fait frémir la prairie
pour un instant
puis se fait brin, poussière
moins que rien face au vent éternel.


Escrito con tinta roja

La poesía es la sombra de la memoria
pero será matera del olvido.
No la estela erigida en la honda selva
para durar entre sus corrupiones,
sino la hierba que estremece el prado
por un instante
y luego es brizna, polvo,
menos que nada ante el eterno viento.




Exode

Haut dans le jour
tu es celui qui revient
effacer le creux de son pas sur le sable;
le misérable héros qui a échappé au combat
et appuyé sur son bouclier regarde brûler la défaite;
le naufragé sans nom qui s’accroche à un autre corps
pour que la mer ne rejette pas son cadavre tout seul;
le perpétuel exilé qui dans le désert regarde
grandir des villes profondes qui reculent au soleil
celui qui a planté ses armes dans la peau d’un dieu mort
celui qui écoute à l’aube chanter un coq et un autre
parce que les prophéties s’accomplissent : sans voix
et cependant sûr d’avoir tout renié ;
celui qui ouvre la main
et reçoit la nuit.


Éxodo

En lo alto del día
eres aquel que vuelve
a borrar de la arena la oquedad de su paso;
el miserable héroe que escapó del combate
y apoyado en su escudo mira arder la derrota;
el náufrago sin nombre que se aferra a otro cuerpo
para que el mar no arroje su cadáver a solas;
el perpetuo exiliado que en el desierto mira
crecer hondas ciudades que en el sol retroceden;
el que clavó sus armas en la piel de un dios muerto
el que escucha en el alba cantar un gallo y otro
porque las profecías se están cumpliendo: atónito
y sin embargo cierto de haber negado todo;
el que abre la mano
y recibe la noche.