.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


mercredi 26 septembre 2012

Chantal Maillard (1951 - Espagne)



Tu ne mettras pas de nom au feu

Tu ne mesureras pas la flamme
avec des mots dictés par la tribu,
tu ne mettras pas de nom au feu,
tu ne mesureras pas sa portée.
Toutes les flammes sont le même feu.
Mon corps est une torche qui éclaire l’effroi
que la raison élabore dans ses ténèbres.
Il faut regarder le corps, bien à l’intérieur,
toucher le centre ardent, l’ouvrir et propager
la jouissance de la lave.
Qu’importe entre quelle hanche
dans quelle poitrine elle glisse,
qu’importe la stature, le sexe ou la matière
puisque tous nous marchons sur le même bûcher.
Tu ne mesureras pas la flamme avec des mots qui dissimulent
les vieux sentiments des hommes.


No pondrás nombre al fuego

No medirás la llama
con palabras dictadas por la tribu,
no pondrás nombre al fuego,
no medirás su alcance.
Todas las llamas son el mismo fuego.
Mi cuerpo es una antorcha que alumbra los espantos
que la razón constituye en sus tinieblas.
Hay que mirar al cuerpo, muy adentro,
tocar el centro ardiente, abrirlo y propagar
el gozo de la lava.
No importa en qué caderas,
en qué pecho resbale,
no importa la estatura, el sexo o la materia
pues todos caminamos sobre la misma pira.
No medirás la llama con palabras que encubren
los viejos sentimientos de los hombres.