.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


dimanche 16 juin 2019

Rocio Ágreda Piérola (1981 - Bolivie)




Ami, nous avons perdu tant d’orients,
vécu tant de morts mort tant de vies
sable dans le désert
amie,
nous avons lavé et brûlé tant d’habits
qui n’étaient pas à nous
dans les rivières de la mort
nous avons parlé tant de langues fruitées
et trouvé repos au bord du chemin
le soir enfant
sur les montagnes à chercher la vision
dans l’eau quand nous étions désert dansant
pour l’œil de l’esprit
mon cœur est aujourd’hui un scorpion assiégé par le feu
mais de ce doux venin il apprendra aussi à mourir
de cette minuscule solitude de cette lumière
où je me couche pour respirer un instant
et continuer à travailler les fleurs du son
du délire
du froid
de l’obscurité
de la vie des autres
de la mort qui toujours nous est propre



Amigo, hemos perdido tantos orientes
muerto tantas vidas vivido tantas muertes
arena en el desierto
amiga,
hemos lavado y quemado tanta ropa ajena
en los ríos de la muerte
hemos hablado en tantas lenguas frutales
descansado a la orilla del camino
en la tarde niña
en los cerros buscando la visión
en el agua cuando  fuimos desierto que baila
para el ojo del espíritu
mi corazón es ahora un escorpión sitiado por el fuego
pero también de este veneno dulce él
aprenderá a morir
de esta soledad diminuta de esta luz
en la que me recuesto a respirar un instante
para seguir trabajando las flores del sonido
del delirio
del frio
de la oscuridad
de la vida de los otros
de la muerte siempre propia




Comme dans un vieux film
d’un mythe obscurci
Atahualpa converse avec Pizarro
(Pizarro ne fait que bouger les lèvres)
dans le film de Atahualpa
sa langue (celle de Pizarro) n’est pas d’un homme
sa langue (celle de Pizarro) est un grognement étrange
mais c’est quoi ce que tu me craches homme rouge,
mais c’est quoi ça homme laineux ?
une pure souillure,
une procession infinie de fourmis lugubres
demande Atahualpa
Pizarro ne fait que bouger les lèvres.


Como en una vieja película
de un oscurecido mito
Atahualpa conversa con Pizarro
(Pizarro sólo mueve los labios)
en la película de Atahualpa
su lengua (la de Pizarro) no es de hombre
su lengua (la de Pizarro) es un gruñido extraño
pero qué es esto que me arrojas hombre rojo,
pero qué es esto hombre lanudo?
pura mancha,
una procesión infinita de lóbregas hormigas?
pregunta Atahuallpa
Pizarro sólo mueve los labios.