.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


mardi 11 septembre 2012

Oliverio Girondo (1891-1967, Argentine)





C’EST LA BAVE


C’est la bave.
Sa bave.
L’effervescente bave.
La bave puante,
caustique ;
la noire bave rance
que bave cette espèce baveuse de vermines
par ses ruminantes lèvres rongées,
par ses pupilles d’huître putréfiée,
par ses vessies troubles pavés de calculs,
par ses vieux nombrils de marchandeur décrépit,
par ses bosses pleines d’intérêts composés,
d’actions usurières ;
la pestilente bave,
la bave doctorale,
qui fait honte au velours des sièges avec indemnités
et autres fauteuils moelleux pas moins salis.
La bave bégayante,
collante,
visqueuse,
qui imprègne les murs tapissés de liège
et contemple le désastre à travers la poche.
La bave dissolvante.
L’aigre bave rouillée.
La bave.
Oui ! C’est sa bave...
ce qui rouille les heures,
ce qui pervertit l’air,
le papier,
les métaux ;
ce qui infecte la fatigue,
les yeux,
l’innocence,
avec ses lombrics de dégoût,
avec ses virus de lassitude,
d’idiotie,
de cécité,
de mesquinerie
de mort.



ES LA BABA


Es la baba.
Su baba.
La efervescente baba.
La baba hedionda,
cáustica;
la negra baba rancia
que babea esta especie babosa de alimañas
por sus ruminantes labios carcomidos
por sus pupilas de ostra putrefacta,
por sus turbias vejigas empedradas de cálculos,
por sus viejos ombligos de regatón gastado,
por su jorobas llenas de intereses compuestos,
de acciones usurarias;
la pestilente baba,
la baba doctorada,
que avergüenza la felpa de las bancas con dieta
y otras muelles poltronas no menos escupidas.
La baba tartamuda,
adhesiva,
viscosa,
que impregna las paredes tapizadas de corcho
y contempla el desastre a través del bolsillo.
La baba disolvente.
La agria baba oxidada.
La baba.
¡Sí! Es su baba…
lo que herrumba las horas,
lo que pervierte el aire,
el papel,
los metales;
lo que infecta el cansancio,
los ojos,
la inocencia,
con sus vermes de asco,
con sus virus de hastío,
de idiotez,
de ceguera,
de mesquindad,
de muerte.