.......................................................................................................................................................................................... Photo S.C.
Tartares, Ouzbeks, Nénètses / tout le peuple ukrainien, / et même les Allemands de la Volga / attendent les traducteurs.
Et peut-être, en ce moment, / un Japonais / me traduit en turc / et atteint mon âme.

Ossip Mandelstam


vendredi 5 novembre 2021

Lucía Estrada (1980 – Colombie)

 


 

Quotidienne

 

Un geste amer se détache de ma bouche, roule dans les rues, disparait.

Quelque part, quelqu’un cultive des miroirs pour tout effacer. Son travail se réfléchit dans chaque syllabe d’air.

Vivre est une étrange condition de la mort. Je la porte avec moi, mais sa lune spectrale ne pèse pas dans mon corps.

Dans chaque visage reflété un nom se dilue. Je prie pour que le mien demeure indéchiffrable.

 

 

Cotidiana

 

Un gesto amargo se desprende de mi boca, rueda por la calles, desaparece.

En algún lugar, alguien cultiva espejos para borrarlo todo. Su oficio reverbera en cada sílaba de aire.

Vivir es una extraña condición de la muerte. Yo la llevo conmigo, pero no pesa en mi cuerpo su luna espectral.

En cada rostro reflejado un nombre se diluye. Ruego para que el mío permanezca indescifrable.